Yanis, déesse de la mort, n’est plus. La jeune fille élevée comme une divinité s’est enfuie du temple où elle a toujours vécu cloîtrée, à la recherche de sa véritable identité. A son cou, Arkem, la redoutable pierre capable de déchaîner les pires horreurs, et dont elle semble la seule maîtresse. A ses côtés, Kéo Seaghan, le mage qui en voulant récupérer Arkem lui a révélé sa véritable destinée, et qui lui donne un nouveau nom: Sinièn. A ses trousses, d’horribles créatures. Mais alors qu’elle découvre à peine le monde, la nature autour d’elle, sa propre personne, tout lui rappelle la lourde responsabilité qui est la sienne et qu’elle veut de moins en moins assumer. Elle sait qu’elle n’a pas d’autre choix que suivre Kéo à la rencontre des mages de Lannilis si elle veut des réponses, mais elle ne peut pas supporter de se voir ainsi dépossédée d’elle même. Pourtant, le monde qu’elle découvre, avec ses hostilités, la révèle chaque fois un peu plus à elle-même, qu’il s’agisse des Lamies qu’elle peut faire fuir d’un simple cri, des Elfes dont elle comprend la langue ou des licornes qu’elle peut approcher et diriger.
Ce deuxième tome des aventures de la jeune fille aux multiples identités m’a embarquée plus sûrement encore que le premier. Il s’agit essentiellement du long voyage de Sinièn à la recherche de ses origines, ponctuées de toutes les rencontres qui vont construire petit à petit son personnage. L’occasion pour Valérie Simon de développer son univers dans toute sa richesse. Le Shegir, colosse monstrueux que l’Innommable a envoyé après Sinièn, ou encore les plantes carnivores du marais sont autant de créatures aussi inquiétantes qu’originales. On croisera aussi des licornes… mais loin d’être ces créatures pures et éthérées auxquelles on s’attend, elles sont imposantes, craintes. De quoi renouveler de manière efficace les personnages classiques de ces univers magiques. J’ai tout particulièrement aimé la confrérie des magiciennes d’Oonagh, fermée aux hommes et rivales des si respectés mages de Lannilis, qui donnent un contrepoint féminin complexe et loin des clichés aux personnages masculins si forts de la fantasy.
Pour autant, j’ai tout simplement adoré le personnage de Kéo Seaghan. J’avais déjà beaucoup aimé son rôle de prisonnier un peu aventurier dans le premier tome. Ici, il dévoile toute sa puissance de mage mais aussi tout son savoir. Pour autant, c’est loin d’être un personnage qui se prend au sérieux, puisqu’il sait aussi se montrer espiègle et attachant, notamment dans ses faiblesses devant la plastique de déesse (sans jeu de mot) de la jeune fille qu’il escorte. J’ai passé tout le roman à attendre que Kéo et Sinièn se rapprochent et si ma frustration n’a cessé de monter, je dois reconnaître que j’ai aimé que l’histoire ne cède pas trop vite à cette facilité. Car ce serait trop facile si Sinièn n’opposait à son immense destinée son petit coeur tout prêt à être séduit. Au coeur de ce roman, c’est avant tout le joli portrait d’une femme qui se construit en découvrant la vie autant par l’amour que par la pluie et la forêt qui l’entourent. J’ai donc retrouvé avec bonheur le personnage que j’avais adoré, à la fois exceptionnelle et si simple.