Deux enfants égorgées dans leur lit, une femme crucifiée sur un mur, toutes les trois couvertes d’étranges symboles sataniques gravés dans leur chair, un mari retrouvé inconscient un couteau en main, ne se rappelant de rien… Du pain sur la planche du lieutenant Antonio Alonzo, policier aguerri, usé par l’alcool et en proie à de sombres cauchemars. Mais le schéma se reproduit un peu partout dans le monde, et attire l’attention du Vatican, qui dépêche auprès de lui Pierre Casanova, un jeune théologien, afin de mieux comprendre ce qu’ils interprèteraient volontiers comme l’annonce de l’Apocalypse. Un événement visiblement prévu de longue date, lié à un mystérieux livre que des moines s’appliquent à dissimuler depuis le Moyen Age, un livre qu’il ne faut lire à aucun prix.
Comme je n’aime pas les romans policiers cousus de fil blanc qui s’amusent à créer un suspens exacerbé façon série US, je suis toujours un peu sceptique en ouvrant un thriller. Celui-ci a su relever le défi haut la main. D’abord parce que le protagoniste, Antonio Alonzo, m’a beaucoup plu par son côté bon flic mais mec médiocre: victime d’un alcoolisme dont les crises de manque sont décrites avec une noirceur et un saturnisme stupéfiants, hanté par une femme qu’on devine aussi obsédante que lointaine, il forme avec le prêtre Pierre Casanova, serein et réfléchi, un duo tout à fait séduisant, qui ouvre la porte à une ironie qui fait vite mouche, qu’il s’agisse d’un Antonio Alonzo qui ne parle pas un mot d’italien, ou d’un prêtre qui s’appelle Casanova. Quant à l’intrigue, là encore, j’ai immédiatement accroché. Les descriptions de scènes de crime sont empreintes d’un mysticisme qui créent un profond malaise, soigneusement entretenu par l’heptagramme inversé qui sépare les différents chapitres. Avec un fantastique très habile, on ne cesse d’osciller entre enquête policière et quête diabolique. Le petite cerise sur le gâteau vient de l’histoire parallèle, celle du mystérieux livre interdit que les moines cherchent à cacher pendant des siècles, qui fascine autant qu’il terrifie. Ah, le pouvoir des livres…