Satine Müller en a plus qu’assez de toutes ces filles de son lycée qui se pâment devant les vampires de leurs romans à l’eau de rose. Cette mode des bellâtres buveurs de sang a même complètement retourné le cerveau de sa meilleur amie, Carla. Trop, c’est trop: Satine publie sur un blog un retentissant pamphlet expliquant pourquoi la réputation des vampires est franchement surfaite. Sauf que son pamphlet a immédiatement un effet inattendu: Satine devient l’objet de toutes sortes de brimades, son casier est vandalisé plusieurs fois par jour. La mode des vampires serait-elle plus sérieuse qu’elle ne le pensait? Lorsque Hugo Rivoire, l’un des garçons les plus beaux et les plus populaires du lycée, se met en tête de l’intimider pour qu’elle retire son pamphlet, elle a du mal à comprendre. Surtout qu’Hugo a une fâcheuse tendance à faire vaciller la volonté de Satine avec son seul sourire. Difficile à concilier avec ses menaces, rendues plus palpables par Urbain, Félix et Marc, ses trois acolytes qui semblent beaucoup moins sympathiques. Seul Eric semble activement la soutenir à maintenir ce pamphlet, même à en amplifier la portée: les buveurs de sang n’ont qu’à bien se tenir! Les choses se compliquent lorsque Carla commence à se laisser séduire par Marc, et Hugo devient son partenaire pour sa prochaine audition de danse. Satine se sent cernée… Mais pourquoi ces beaux garçons sont-ils prêts à aller si loin pour lui faire retirer son pamphlet contre un vampire?
J’ai attaqué ce livre en m’attendant à un roman pour adolescentes. Certes, c’en est un, mais la plume de Sophie Jomain en fait quelque chose de très frais, très prenant, plein d’humour et loin de tomber dans la niaiserie attendue. J’ai beaucoup aimé cette héroïne certes apparemment banale, affublée de grosses lunettes et d’une copine bien plus belle qu’elle, diminuée par un accident au début de l’histoire, prise pour cible par tout son lycée et qui, pourtant, ne manque pas de caractère ni de charme. J’aime les héroïnes qui ont de la poigne. De manière générale d’ailleurs, j’ai trouvé les personnages particulièrement convaincants. On n’a pas beaucoup de doutes sur la réelle nature des quatre garçons, mais malgré cela, on reste longtemps dans le doute quand aux réelles intentions d’Hugo. S’il prétend s’attacher à Satine et être sincère dans sa volonté de la protéger (ce qui provoque chez elle des réactions physiques plutôt troublantes….), il est tout aussi étrange de constater que l’inquiétant Marc tient exactement le même discours et les mêmes arguments à ses victimes. Il en est de même pour Eric, qui affirme être un soutien pour le pamphlet avec tellement de conviction qu’il en passerait presque pour un dangereux maniaque. Même Carla, qui semble au départ être guère plus qu’une jolie danseuse écervelée, se révèle bien moins superficielle et bien plus touchante que prévu lorsque ses amours vampiriques prennent une tournure inattendue.
Les beaux garçons de l’histoire ne sont d’ailleurs pas là pour faire de la figuration. Les vampires de Sophie Jomain aiment la sensualité et ne se gênent pas pour le dire et le montrer, et la tension sexuelle qui se dégage des étreintes de Satine et Hugo est palpable et ne se cantonne pas au sous-entendu. La manière dont les vampires éblouissent leur entourage se mue donc en une attraction physique assez primaire et j’ai aimé ce côté franc de l’attrait inexplicable et pas nécessairement sentimental d’un vampire qui n’a qu’à sourire pour faire se pâmer une fille, même la plus déterminée qui soit.
Certains aspects sont néanmoins restés un peu en retrait au point que je me suis demandé si on cherchait vraiment à me faire avaler ça. Par exemple, que Hugo soit très opportunément un danseur exceptionnel, parfait, mais les scènes de danse manquent un peu de détail et de profondeur (alors que pour le coup, côté rapprochement physique, il y a de quoi faire) et surtout, le fait qu’il fasse parti des recruteurs des danseuses du Moulin Rouge à dix-huit ans et que ça n’étonne personne, mouais, un peu gros. Il aurait fallu fignoler un peu ces petites choses pour décrocher le cinq sur cinq.